«Crève, et tu auras ton petit coin dans ton pays!», le vendeur de drogues marocain m'avait dit chez la Caritas. Une phrase qu'on pourrait
appeler typique dans ce Grand-duché de Luxembourg, où ceux qui sont allés travailler pour financer leur vie de ne rien faire (respectivement
leur vie de criminels) doivent de plus en plus céder leurs places dans les centres sociaux à ceux, de qui on ne cesse de nous répéter qu'ils
ont des droits et que nous devons les respecter. Mais ce n'est pas pour cette raison que j'ai cité cette phrase. En effet, ce que le monsieur
arabe a dit, est bien vrai, bien réel, bien ma situation et celle de tous ceux qui n'ont jamais appris à ce défendre. Ce que je veux dire,
c'est que n'importe où dans ce pays, où je cherche à trouver un refuge au calme et en sécurité, je ne le trouverai jamais. Juste une question
de temps et ce sera comme à l'endroit d'où je me suis enfui: dérangé, emmerdé et chassé par des jeunes, ou bien terrorisé, volé et tapé par
des immigrants. À ajouter que, si jusqu'à présent ceux, qui utilisaient la violence physique contre moi, étaient toujours des non-résidents,
cela aussi changera bientôt, l'agressivité et la disposition à casser et taper sans se soucier des conséquences pour la victime me semblant
augmenter en flèche chez les jeunes d'ici.
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Quelle illusion grotesque de croire d'avoir trouvé de manière permanente un vrai chez-moi ici! Avec toutes ces expériences, que j'ai faites avec
ceux, qui s'appellent des êtres humains au Luxembourg, comment ai-je pu croire que le panneau dans mon squat «My home is my castle. Please,
respect it!» pourrait être autre chose que les rêveries d'un naïf incurable, qui depuis des années continue obstinément à croire au père Noël,
alors que des dizaines de fois, la réalité lui a démontré que celui-ci n'existe pas? C'est vrai, durant deux ans, ma demeure était effectivement
mon château. Certes, il y a eu cette période, où la fille à la jaquette jaune et ses copains me dérangeaient, il y a eu quelques (rares) nuits,
où j'ai dû chercher abri ailleurs, parce que des gens bourrés d'alcool et de je ne sais pas quoi encore s'installaient dans mon nid et avec le
renflement et autres bruits sans interruption, il ne m'était pas possible de fermer les yeux une seule minute. Mais, durant tout ce temps, je
n'étais pas une seule fois agressé, on ne m'a pas volé la moindre chose et les jeunes restaient normalement à l'extérieur, souvent même à une
distance telle que je n'étais aucunement dérangé. Les choses ont radicalement changé cette année. Aucune idée à quoi cela pourrait être dû; le
fait est, que ce qui était mon chez-moi depuis octobre 2016, devient de plus en plus être couché comme du bétail dans le froid et l'humidité,
parce que les écoliers du lycée à proximité utilisent mon squat pour leurs fins. D'abord, c'était avant tout pour fumer leurs joints durant la
pause de midi, mais actuellement, ils viennent pratiquement tous les jours (à l'exception du weekend), les uns pour manger leur pizza (et
laissant traîner un kilo de déchets lorsqu'ils partent), les autres pour s'asseoir et écouter leur musique agaçante, d'autres encore, juste pour
discuter... Ils pourraient aller à mille endroits pour faire ces choses (et les deux ans avant, ils sont bien allés ailleurs), pourquoi venir ici,
pourquoi me chasser de ma maison, pourquoi me prendre ces quelques mètres carrés, où j'espérais avoir trouvé mon petit coin dans le pays, où
j'ai travaillé durant 18 ans? Ou, peut-être plus correctement exprimé, où j'ai jeté 18 ans de ma vie pour aller travailler pour aider à construire
le nid de ces enfants de luxe, qui me remercient en me refusant le moindre respect, en me faisant mal (me demandant pour combien ce plaisir sans
limites de faire souffrir ceux qui ne peuvent pas se défendre joue dans ce qu'ils me font), me mettant de plus en plus dans une situation, où soit
je redeviens un réfugié, soit je résigne entièrement en me disant que la place, que le marocain a évoqué, est bien la seule, où je trouverais enfin
le repos...
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Si l'on admet que le non-respect serait mesurable sur une échelle de 0 à 5, on pourrait considérer que la première étape à franchir par le
non-respectueux consiste à ne pas respecter la tranquillité des autres. Situation qu'au Luxembourg 2019, on rencontre partout où on va: un bruit
affreux sans arrêt dans les centres sociaux, des gens qui hurlent dans leur GSM dans les salles d'attente, des jeunes qui écoutent leur musique,
regardent des vidéos ou font des jeux sur smartphone sans utiliser des casques dans les bus et trains, ces portugais, refusant catégoriquement
de parler notre langue, qui crient comme des fous devant leurs cafés... Que les écoliers ont fini par ne plus respecter mon chez-moi, n'est donc
pas si étonnant que cela. En fait, rien d'autre que vivre la réalité dans un pays, où des mots comme politesse, égards envers autrui et respect
ont perdu toute signification. Ce qui n'est pas une consolation pour moi bien-sûr, d'autant plus que non seulement le nombre de fois que cela
arrive, mais aussi le nombre des jeunes, qui viennent s'installer régulièrement ici, ne fait qu'augmenter. L'étape numéro 2, ne pas respecter
les affaires des autres, a été franchie pour la première fois, hier midi. Jusqu'à ce jour, les jeunes sont bien restés dans "leur coin",
laissant leurs saletés là où ils s'étaient installés, mais restant à distance de mon sac de couchage et de mes autres affaires. Ils étaient venus
toute une bande; moi-même m'enfuyant dehors, resté couché dans la neige, espérant qu'ils ne resteraient pas trop longtemps. Cela durait plus d'une heure
et quand je suis retourné à l'intérieur, j'ai vu ... qu'ils avaient utilisé mon squat pour y faire une bataille de boules de neige! Un parc vraiment
très grand où ils auraient pu jouer leurs jeux, mais non, ils avaient choisi de les jouer dans ce qui était ma maison! De la neige partout, bien-sûr,
y compris sur mes couvertures. Comme je l'ai déjà dit, la première fois, qu'ils ont fait le pas de ne plus respecter mes affaires!
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Le 1er février 2019, le jour où j'ai rédigé cet article, personne n'a encore franchi l'étape numéro 3, une extension de l'étape numéro 2, où le
non-respect des affaires d'autrui s'associe à des actions devenant contraire au code pénal, en l’occurrence, voler ou volontairement détruire ce
peu de choses que je possède. Chose «normale» chez la Caritas (et comme leur directeur n'a toujours pas jugé nécessaire de répondre à mes questions,
devant supposé, excusé et toléré par les gens qui y travaillent), je pense que j'ai toutes les raisons de craindre que de tels actes vont se
produire dans cet endroit, que le clochard stupide avait l'habitude d'appeler «tellement différent de la capitale», dans un futur très proche: juste
un tout petit peu plus d'alcool ou autres stupéfiants, la présence de quelqu'un qui convainc les autres que les vrais hommes ont le courage de le
faire ou, au contraire, l'absence de celui qui empêche les autres de se voir en héros quand ils volent ou cassent les affaires des gens qui vivent
dans la rue ... et déjà on y est! La distance à franchir pour arriver à l'étape 4 est sans aucun doute bien plus longue. Ceux qui m'ont poussé dans
les escaliers (Courage), frappé avec un journal roulé dans la figure (Téistuff), tapé brutalement du pied dans la tête (place d'Armes) ou encore jeté
plein de bouteilles sur moi et finalement brisé mes côtes par des coups de pieds, c'étaient toujours des jeunes arabes (cette phrase, qualifiée sans
aucune doute de raciste par notre gouvernement, les responsables des centres sociaux et ces associations qui nous tiennent de gigantesques affiches, nous
disant qu'avoir peur d'eux ne serait que nos propres préjugés, n'est autre que dire ce qui est arrivé et par qui; ce ne sont que des chiffres, purs et
simples, sans relation avec ce que je pense ou ne pense pas). Mais, quand on entend les jeunes (souvent à peine sortis de l'école primaire)
discuter entre eux: s’entre-taper avec ceux qu'ils jugent leurs ennemis, une bagarre, se terminant avec un nez en sang ou un bras cassé, «je vais lui
casser les dents», «j'ai plein d'amis et nous y irons tous ensemble, alors ils vont regretter...», «je le prendrai et le taperai de la tête contre le mur»...
Juste une question de temps, je dirais! Pour être complet, l'étape 5 comprendrait des actions comme celle des immigrés à Berlin, qui essayaient de brûler vif
un sans-abri - aucune idée, si et quand cela pourrait devenir une réalité ici...
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Quand on voit ces jeunes sans aucune notion de respect, on pourrait se demander comment c'est possible, mais est-ce qu'il faut vraiment se le demander?
Quand on voit les adultes dans ce pays, ces robots sans âme, courant derrière l'argent, avec toute leur indifférence, leur fausseté, leur jalousie, leurs
préjugés et leur haine, n'est-ce pas une conséquence logique que dans ce monde sans sentiments humains, les jeunes n'ont jamais eu l'occasion d'apprendre
ce que cela signifie de respecter les autres, leurs affaires et leur calme? En tout cas, si on imagine que les jeunes d'aujourd'hui seront les adultes de
demain, qui auront des enfants à leur tour ... bien content d'être né en 1962 et ayant eu la chance de passer une grande partie de ma vie dans un pays,
où on rencontrait partout des êtres humains qui étaient vraiment humains!
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allu, février 2019
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